La confiance fonctionne-t-elle également unilatéralement ?
Seulement si on ne remarque pas qu’elle est unilatérale. La confiance repose en effet de manière très décisive sur une réciprocité identifiée. Celui qui fait confiance à quelqu’un part du principe qu’il bénéficie d’une confiance équivalente. C’est comme en amour. Aimer et être convaincu que l’amour est réciproque, encourage la relation. Dans notre culture, la réciprocité est une norme sociale importante. Ce n’est pas un hasard si nous invitons, par exemple à notre anniversaire, avant tout ceux qui nous ont déjà invités. En revanche, si nous pensons découvrir des signes qu’il n’y a pas de réponse à notre attitude confiante, nous considérons cela comme rupture de confiance. Par la suite, notre propre confiance diminuera.
Pourquoi, dans une relation amoureuse, la confiance se mesure-t-elle pour la plupart des gens à la fidélité sexuelle ?
Parce que pour la plupart des gens, la sexualité représente la différence essentielle entre la vie en couple et d’autres relations. Dans d’autres domaines, comme dans la relation médecin-patient, la compétence professionnelle joue un rôle fondamental pour la confiance. Dans d’autres relations, cet aspect sera totalement insignifiant.
Dans votre activité professionnelle, vous donnez aussi des conseils psychologiques aux entreprises. Que conseillez-vous aux dirigeants d’entreprises qui s’efforcent de montrer une image digne de confiance ?
Le premier objectif n’est pas d’irradier de confiance, mais de la vivre. Ensuite, elle rayonnera automatiquement. On ne parle pas d’un produit de marketing. Les entreprises doivent comprendre la confiance comme une ressource importante dans les rapports internes et externes. Elles doivent s’efforcer d’instaurer une culture de la confiance. Avant de vouloir changer les choses, il faut s’intéresser à l’écart qui peut exister entre les principes généraux et la philosophie postulée d’un côté, et la vie « réelle » dans l’entreprise de l’autre.
« Le premier objectif n’est pas d’irradier de confiance, mais de la vivre. »
Ce que la plupart des dirigeants n’aiment probablement pas particulièrement entendre.
Dans le fond, il s’agit de l’attitude fondamentale des dirigeants d’entreprise. Face aux défis complexes et à la nécessité d’innover, nous observons toutefois une disposition accrue des entreprises à prendre le pari de la confiance.
Quel pari ?
De s’engager sur le terrain de la participation et de la transparence, sans oublier d’en tirer les conséquences éventuelles. Prenons l’exemple d’une entreprise familiale. Si tout passe par le patron qui décide de tout, et tout seul, les bases mêmes de la construction de la confiance n’existent pas. Un tel climat ne peut générer que déception et frustration. À mon avis, il n’y a plus de place aujourd’hui pour des dirigeants bien payés qui ne s’impliquent pas dans la culture de la confiance de leur propre entreprise.
Vous vous occupez aussi de sportifs. Où sont les points sensibles ici ?
Beaucoup de gens pensent que les sportifs de haut niveau ont une confiance en soi élevée, mais souvent ce n’est pas le cas.
Pourquoi pas ? Leur succès leur apporte pourtant une grande reconnaissance.
Il existe une différence fondamentale entre reconnaissance conditionnelle et absolue. Les sportifs de haut niveau sont des gens qui, depuis leur plus jeune âge, se définissent par leur performance et sont définis comme tels de l’extérieur. Par cette forme de reconnaissance conditionnelle, ils apprennent l’importance de réussir en permanence, ce qui, parallèlement, augmente considérablement la crainte d’un échec. La reconnaissance conditionnelle n’est pas négative en soi, mais il faut aussi faire l’expérience de la reconnaissance indépendante de la performance, par exemple par la famille ou par de très bons amis.
Vous parlez du phénomène de la « Soccer Mom » ou du « Tennis-Papi ». Du dressage parental ?
Pas nécessairement. Souvent, il s’agit de processus très subtils et non intentionnels. Observez donc le comportement de parents après une victoire de leur enfant dans un tournoi ou après un échec. Les réactions de déception parlent d’elles-mêmes, bien que ces parents ne souhaitent pas, dans la plupart des cas, punir leur enfant pour cela.
Comment un sportif se sort-il de cette situation ?
Il faut commencer par une sensibilisation à ces processus et comprendre les raisons qui rendent d’éventuels échecs si redoutables. Dans l’idéal, il faut travailler en collaboration constructive avec les parents et les entraîneurs.